En RDC, la fête des parents est célébrée chaque année, le 1er août. Ce jour spécial est dédié à honorer la mémoire des parents, qu'ils soient vivants ou décédés. A Goma, les cimetières reçoivent des membres de plusieurs familles venus nettoyer les tombes et rendre hommage aux siens qui ont quitté cette terre.
Dès 6 heures du matin, des Gomatraciens ont afflué le cimetière de l’ITIG, l’un des plus anciens de la ville. Sur place, les scènes de recueillement se mêlaient à celles d’entretien, les familles munies de houes, balais ou bêches s’activant autour des sépultures. Un hommage silencieux, empreint de respect et de mémoire, rendu à ceux qui reposent loin des regards, mais toujours présents dans les cœurs.
Malheureusement, un constat amer s'est imposé. De nombreuses tombes semblent abandonnées. Les services d'entretien n'existent plus, et certaines familles sont venues avec des outils tels que des houes, des balais et des bêches pour nettoyer les sépultures de leurs êtres chers.
Dans l'ambiance morose du matin à Goma, nous avons croisé Robert Ziwabanza Ramazani, qui est venu rendre hommage à sa maman décédée le 5 février 2009. Pour lui, cet acte est profondément symbolique et lui permet d'immortaliser la mémoire de sa mère.
« Je suis venu ici parce que des êtres qui me sont chers reposent en ces lieux, notamment ma mère, qui est enterrée ici à l'ITIG. Aujourd’hui, en cette journée de commémoration de nos parents, qu’ils soient vivants ou décédés, j’ai jugé bon de venir me recueillir sur sa tombe, sa dernière demeure. J’en ai aussi profité pour effectuer quelques entretiens, notamment les travaux que j’ai déjà amorcés. Ma mère est décédée le jeudi 5 février 2009, et je garde d’elle un souvenir vivant. Tout ce que je suis aujourd’hui, je le dois en grande partie à elle. C’est pourquoi je ressens non seulement l’obligation, mais aussi la mission d’honorer sa mémoire », a-t-il confié.
De son côté, madame Henriette Fatuma a partagé sa difficulté à retrouver la tombe de son père décédé en 2008, dont l'entretien fait défaut. Elle a prévu des travaux pour reconstituer la sépulture et honorer la mémoire de son papa.
« Moi aussi, je suis venu aujourd’hui ici, au cimetière de l’ITIG. C’était à l’occasion de la célébration de la fête des parents. Je me suis dit que, pour une journée aussi significative, je ne pouvais pas rester à la maison. Mes parents sont inhumés ici, c’est pourquoi j’ai décidé de venir entretenir la tombe de mon défunt papa et voir dans quel état elle se trouve. Cela fait maintenant au moins 17 ans que notre père nous a quittés. Personnellement, je garde un très bon souvenir de lui. C'était une personne très importante dans notre famille, et dans ma vie en particulier. Je peux dire qu’il a été à la fois père et mère pour nous. Tout l’amour que notre maman aurait dû nous donner, nous l’avons reçu à travers lui », a-t-elle fait savoir.
Et de poursuivre :
« Notre mère est décédée très tôt, alors nous sommes restés seuls avec notre père. Il faisait tout pour nous. Ce que nous sommes aujourd’hui, c’est en grande partie grâce à lui. Et je sais que, de là où il est, il est fier de nous, car il ne nous a pas laissés dans la rue. Ce que je peux lui dire aujourd’hui, c’est merci. Merci de nous avoir montré le bon chemin. Le premier chemin qu’il nous a transmis, c’est celui des études. Le deuxième, c’est celui de la parole de Dieu. Et c’est en suivant ce chemin que nous sommes devenus des adultes responsables. C’est pour cela qu’en cette journée des parents, nous avons décidé de venir célébrer avec lui tout ce qu’il a été pour nous », a-t-elle confié.
Cependant, pour d'autres, la situation est encore plus préoccupante. Madame Brigitte Makasi, veuve depuis 2019, n'a pas réussi à retrouver la tombe de son mari, détruite depuis 2023 en raison de rumeurs sur la vente du cimetière aux mains d'un opérateur économique local.
« Mon mari est décédé en novembre 2019. Nous sommes même venus l'enterrer ici, à Gabiro. Un an après sa mort, la famille s'est réunie pour faire quelques contributions afin de construire une pierre tombale, pour que nous ne perdions jamais la trace de l'endroit où il repose. Nous y sommes parvenus et avons réussi à lui construire une tombe. Malheureusement, aujourd’hui, je suis venue lui rendre hommage, mais j’ai du mal à retrouver cette tombe que nous avions bâtie pour lui. Les voisins du cimetière me disent qu’elle a été démolie, parce qu’un commerçant bien connu de Goma aurait affirmé avoir déjà acheté cet emplacement », a confié la veuve, les larmes aux yeux.
Pour de nombreuses familles, cette journée est aussi un moment de partage, permettant de se retrouver autour d'un repas entre parents vivants après avoir honoré ceux qui sont partis.
Parallèlement, la journée des défunts permet aux familles de se souvenir de leurs proches disparus. Des visites sont organisées dans les cimetières, où les tombes sont nettoyées et fleuries, en signe de respect et d’amour. Des messes et des prières sont célébrées pour honorer les âmes des disparus.
Se souvenir de nos défunts, c’est maintenir leur mémoire vivante dans nos cœurs. C’est une occasion de prier pour eux, de raviver les souvenirs, et de se remémorer les instants partagés.
Cette journée revêt une importance particulière en RDC, tant sur le plan culturel que social. Elle renforce les liens familiaux et promeut des valeurs fondamentales telles que le respect, la gratitude et la solidarité. Elle rappelle aussi aux jeunes générations l’importance de la mémoire et des traditions.
En célébrant nos parents et nos défunts, nous préservons notre héritage culturel et transmettons des valeurs essentielles aux générations futures.
La journée des parents et des défunts est un moment de recueillement et de cohésion. Elle unit les familles et les communautés autour de valeurs communes, et contribue à renforcer le tissu social du pays. En se rassemblant pour honorer leurs proches disparus, les Congolais réaffirment leur attachement aux valeurs de mémoire, de respect et de solidarité.
Au loin, des pleurs s’élèvent, les souvenirs refont surface.
Rappelons que la matinée de cette journée, chômée et payée, est consacrée à rendre hommage et à se souvenir des parents et compatriotes disparus.
Josué Mutanava, à Goma