Fidèle à son franc-parler, elle avait ainsi estimé dans les colonnes de Vogue, concernant le symbole qu'elle a été: "Je me fous de l’émancipation féminine. Je m'assieds dessus. Quant à la liberté sexuelle, les femmes ne m'ont pas attendue pour se libérer. Quel malentendu! Je n'ai jamais été scandaleuse. J'ai simplement été celle que j'avais envie d'être."
Engagée jusqu’au bout de sa vie dans la lutte contre la maltraitance animale, elle avait récemment lancé un appel contre la pratique de la chasse à courre. Et en septembre dernier, elle avait lancé une campagne en faveur de l’adoption et contre les abandons d’animaux..
Succès mondial
Née en 1934 et marquée par une éducation très rigoureuse, Brigitte Bardot se destine dans un premier temps à la danse classique. Après avoir posé en couverture de Elle, elle est repérée par le réalisateur Marc Allégret et tombe amoureuse de son assistant Roger Vadim. Par leur intermédiaire, elle fait ses débuts au cinéma dès 1952, à 18 ans.
Brigitte Bardot multiplie les discrètes apparitions (Si Versailles m'était conté… de Sacha Guitry, Les Grandes Manœuvres de René Clair) et tourne dans des péplums en Italie. Sa vie change quand elle décroche le rôle principal de Et Dieu... créa la femme, de Roger Vadim, film de tous les scandales en 1956, qui lui vaut une célébrité aussi soudaine que mondiale.
Elle enchaîne alors les succès: En cas de malheur, Une Parisienne, Babette s'en va-t-en guerre. La Vérité de Henri-Georges Clouzot attire 6 millions de spectateurs en salles. Bardot considérait ce film, au tournage particulièrement éprouvant pour elle, comme le meilleur de sa carrière. "Clouzot a sorti de moi un film extraordinaire", avait-elle assuré à Vogue.
Malgré le succès, Bardot ne cesse de se remettre en question. À l'écoute des critiques la jugeant mauvaise actrice, elle s'efforce, à partir des années 1960, d'accepter les propositions les plus audacieuses.
Le visage de Marianne
C'est ainsi qu'elle tourne en 1962 dans Vie privée de Louis Malle. Un film inspiré par sa propre vie harcelée par les photographes. L'année suivante, elle est dans Le Mépris de Jean-Luc Godard. La séquence inaugurale, où elle dévoile ses fesses à Michel Piccoli, devient l'une des plus célèbres de l’histoire du cinéma et renforce son mythe.
Bardot tente de casser une nouvelle fois son image dans Viva Maria!, un western parodique signé Louis Malle où elle donne la réplique à Jeanne Moreau. Le film est un immense succès (3,4 millions d'entrées) et un triomphe pour Brigitte Bardot, qui est encensée par la presse pour son interprétation.
Véritable icône nationale, Bardot prête également son visage à celui de Marianne. Elle se lance ensuite dans une carrière de chanteuse avec la complicité de Serge Gainsbourg et signe des tubes intemporels: Harley Davidson, Bonnie and Clyde, mais aussi La Madrague, une de ses chansons les plus connues, inspirée par sa maison à Saint-Tropez.
Refus de Hollywood
À l'approche des années 1970, sa carrière ne suit plus de ligne directrice. Elle apparaît fugacement dans Histoires extraordinaires de Louis Malle et Masculin féminin de Jean-Luc Godard, où elle se contente de réciter un texte. Elle accepte aussi sans lire le scénario Shalako, un western oubliable avec Sean Connery.
Hollywood la convoite, mais Brigitte Bardot refuse tous les scénarios qu’elle reçoit: Au service secret de sa Majesté, L'Affaire Thomas Crown, qui avait pourtant été écrit pour elle. Elle refuse aussi Les Demoiselles de Rochefort ou encore L'Etranger de Luchino Visconti.
"Moi, vous savez, il faut que je reste dans mon contexte, dans mes habitudes, entourée des gens que je connais, dans des endroits qui me sont familiers", avait-elle expliqué à Vogue. "Je ne pouvais pas fiche le camp aux États-Unis. Même pour tout l’or du monde, c'était impossible."
Les années 1970 sont encore plus expérimentales avec des œuvres hors des sentiers battus comme Les Femmes de Jean Aurel, un film à petit budget tourné en décors naturels, et Don Juan 73 de Roger Vadim, dont le tournage est un calvaire pour elle. Des échecs au box-office, comme Boulevard du Rhum, une superproduction avec Lino Ventura.
"Cette célébrité ne me convenait plus"
Seul Les Pétroleuses, où elle donne la réplique à Claudia Cardinale, rencontre le succès à cette époque. Elle tire sa révérence dans la foulée avec la comédie L'Histoire très bonne et très joyeuse de Colinot trousse-chemise. Sur le tournage, ce métier lui semble dérisoire. Si bien qu'en 1975, deux ans après la sortie, elle met un terme définitif à sa carrière.
"Cette célébrité ne me convenait plus", a-t-elle confié au Monde en 2021. "Ce côté futile… On me mettait en avant comme dans un cirque, je ne pouvais plus bouger, je ne pouvais plus vivre. C’était tout ce que je détestais."
"C'est la plus belle décision de ma vie", avait-elle estimé dans Le Monde en 2018. "La simple lecture d'un scénario m’angoissait, et pendant la vingtaine d'années où j'ai enchaîné les films, j’avais le ventre noué et je développais un herpès au début de chaque tournage. Avec toujours ce même sentiment de vacuité."
“Je sentais qu'il n'y avait plus de grandes histoires, de jolis scénarios, de bons dialogues, il n'y avait plus de metteurs en scène. C'est comme ça que j'ai pris la décision d'arrêter”, livrait-elle encore à BFMTV en mai 2025.
L'ultime plan de son dernier film la montre tenant une colombe à la main. Un symbole de son engagement contre les maltraitances animales, une cause qui la passionne depuis 1962. Elle lance des appels pour les chiens abandonnés, dénonce la chasse aux phoques en 1976. Elle est moquée, mais persiste: en 1986, elle fonde la fondation Brigitte-Bardot.
Omniprésente médiatiquement, Bardot prolonge ses actions caritatives avec Noonoah, le petit phoque blanc, un livre illustré destiné aux enfants. Elle y raconte la vie d'un bébé phoque sauvé des chasseurs par un Inuit. Elle multiplie aussi les coups de gueule contre les actrices portant de la fourrure, de Catherine Deneuve à Sophia Loren.
Radicalisation
La publication de ses mémoires en 1996 est couronnée de succès (plus d’un million d'exemplaires vendus), mais son ex-époux Jacques Charrier lui intente un procès pour "violation de la vie privée". Son fils unique Nicolas porte de son côté plainte contre sa mère pour "atteinte à l’intimité intra-utérine". Le scandale entraîne leur brouille.
Ses prises de position politiques à cette époque se radicalisent. Celle qui n'a jamais caché son admiration pour le général de Gaulle commence à investir le terrain de l'extrême-droite. En 1993, elle épouse Bernard d'Ormale, alors conseiller de Jean-Marie Le Pen, le président du Front National. Elle soutient en 1997 Catherine Mégret, candidate FN à la mairie de Vitrolle, puis Marine Le Pen dont elle dira en 2014 qu’elle “souhaite qu’elle sauve la France”.
Et manifeste publiquement en 1999 son admiration pour Vladimir Poutine, qui assure-t-elle “a fait plus pour la cause animale que nos présidents successifs".
En 2004, elle est condamnée pour des écrits racistes sur les immigrés et les musulmans. Des propos qu’elle réitérera souvent dans la presse ou sur les réseaux sociaux. Dans Un cri dans le silence, en 2003, elle s'insurge ainsi contre "l'islamisation de la France" et dénonce l'abattage rituel des moutons lors de la fête de l’Aïd-el-Kébir.
Dans le même ouvrage, elle traite les homosexuels de "lopettes de bas étage, travelos de tous poils, phénomènes de foire, tristement stimulés dans cette décadence par la levée d’interdits qui endiguaient les débordements extrêmes." Des déclarations qui ont peu à peu fait oublier sa contribution au cinéma et son statut d'icône.









